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12 décembre 2009

Un article remarquable sur l'école maternelle...

J'ai eu rarement l'occasion de lire quelque chose d'aussi remarquable sur l'école maternelle que l'article que je vous livre ci-dessous in extenso. Spécificité française, l'école maternelle est généralement passée au sabre par de soi-disant journalistes qui ne connaissent rien au sujet et se contentent de reprendre les communiqués du ministère de l'Éducation Nationale, ou pire d'interroger trois personnes dans la rue.

Vous comprenez bien qu'il est évident que l'école maternelle est un sujet qui me tient à cœur, et que si j'ai choisi depuis de nombreuses années d'y exercer, et même d'en assumer une direction, c'est bien parce qu'elle est pour moi une des institutions françaises les plus importantes dans la vie de mes concitoyens, et que s'y exerce déjà dans la confiance tous les devoirs et toutes les contraintes de la vie sociale. J'adore ce boulot! Alors que je ne retournerai certainement jamais exercer en école élémentaire. Peut-être en revanche un jour pourrai-je mettre mes compétences à l'épreuve au sein d'un établissement primaire, que j'appelle de mes vœux pour pouvoir assumer les difficiles fonctions de directeur avec confiance et légitimité, en m'y sentant reconnu statutairement et financièrement.

Cet article de Christian Lefebvre est paru dans CSF Magazine de septembre 2009.

L'école maternelle: une originalité française

La rentrée n’est pas si loin : pleurs des enfants, appréhension des parents ont souvent ponctué cette journée importante. Raison de plus pour monter que « l’école maternelle » est un maillon précieux du système éducatif de notre pays…

La France est l’un des seuls pays à avoir fait le choix, dès les lois Jules Ferry, de considérer l’école maternelle comme une école non obligatoire, mais à part entière. La totalité des enfants la fréquente aujourd’hui dès l’âge de 3 ans, et y est confiée à des enseignants délibérément recrutés et formés de la même façon que ceux qui enseignent à l’école élémentaire.

Dans le système éducatif français, la scolarité n’est obligatoire qu'à partir de 6 ans. L'inscription à l’école maternelle (destinée des enfants de 2 à 5 ans) est donc facultative. Les écoles maternelles accueillent néanmoins environ 35% des enfants de deux ans, 95% des enfants de trois ans et la quasi totalité des enfants de quatre et cinq ans. Ces établissements sont ouverts à tous les enfants résidant en France, quelle que soit leur nationalité.

Cette phase de la scolarité comprend traditionnellement trois classes, appelées petite, moyenne et grande sections, auxquelles s’ajoutent parfois une très petite section pour les enfants de moins de 3 ans.

M. Pierre Lombard est directeur d'école maternelle et vice-président de l’Association nationale des directeurs d’école. Pour lui, la réputation de notre école maternelle tient à une mauvaise raison et plusieurs bonnes : « La mauvaise d’abord, c’est un système de garde de jeunes enfants totalement gratuit. Mais puisque la maternelle est une école, elle est bien autre chose qu’un service de garderie. L’école maternelle, contrairement aux crèches par exemple, ne se situe pas dans le prolongement de la famille, mais dans l’autre pilier de la construction de l’enfant, celui de la formation du futur citoyen, à savoir : l’apprentissage du « vivre ensemble », la conquête de l’autonomie par l’instruction et la compréhension des exigences qu’impliquent la vie en société. » Bref, l’enfant en maternelle est déjà un écolier en puissance, et l’école maternelle n’est pas un substitut à la famille. Les textes officiels ne disent pas autre chose : « ils (les enfants) font la différence entre parents et enseignants. Progressivement, ils acceptent le rythme collectif des activités et savent différer la satisfaction de leurs intérêts particuliers. Ils comprennent la valeur des consignes collectives. (…) Ils acquièrent des repères objectifs pour évaluer leurs réalisations (…). Ils apprennent à rester attentifs de plus en plus longtemps. Ils découvrent le lien entre certains apprentissages scolaires et des actes de la vie quotidienne. »

Dans un rapport commandé par l’Union Européenne, il est noté que la France est, avec les pays nordiques (Norvège, Suède, Danemark), parmi les pays qui consacrent le plus grand pourcentage du P.I.B. dans l’accueil des jeunes enfants à partir de trois ans : dans ces pays, « Il est admis par tous que les pouvoirs publics s'investissent fortement dans le domaine de la petite enfance et sont partie prenante dans son accueil. » Quelles différences alors avec ces pays nordiques qui servent parfois d’exemples ? « Les pays nordiques, précise le même rapport, ont un système intégré (affaires sociales et 'éducation) très décentralisé au niveau des communes (…). Il n'y a pas vraiment de programmes nationaux, si ce n'est des orientations au niveau des valeurs qui doivent guider les projets locaux. (…) Le droit à une place est affirmé quand les parents la demandent, et doit être satisfait rapidement mais l'accueil est payant. ». Les pays nordiques ont en effet produit le concept d’"educare", qui unit l'éducation et les soins et leur accorde une importance égale : « le bien-être de l'enfant est recherché dans le ici et maintenant ». Et le rapport d’ajouter : « Les dérives possibles sont soulevées par les nordiques eux-mêmes : c'est le laisser faire, l’aspect garderie et le hiatus avec l'école primaire ».

Quant à la France, elle a « une offre extensive de places d'accueil avec un accès universel, généralisé et gratuit à partir de 3 ans dans le système éducatif ; elle a une offre diversifiée et relativement généreuse pour les moins de 3 ans (en particulier grâce à la scolarisation des enfants de 2 ans). Enfin, elle donne une formation et un statut élevés aux enseignants de l'école maternelle et n’a donc pas de problème de recrutement » précise toujours le même rapport. Pour M. Pierre Lombard, « il existe une différence plus profonde: l’inscription à l’école ne culpabilise pas les mères dans notre pays, justement parce que c’est une école, une Institution, et non pas un substitut de la famille. En France, savoir que son enfant fréquente l’école est valorisant. En Allemagne, par exemple, on passe pour une mauvaise mère si on privilégie sa vie professionnelle en inscrivant sa progéniture dans un « Kindergarten », ce qui n’est pas sans poser des problèmes économiques et même sociétaux. »

Tous les parents le savent : il s’agit d’un passage délicat. Par bonheur, la presque totalité des enfants de cinq ans ont connu la maternelle et ont progressivement appris à devenir des écoliers. Facilite également cette transition le fait que les enseignants de maternelle et d’école élémentaire appartiennent au même corps, celui de professeurs des écoles. Quant on évoque une possible spécialisation de la formation des enseignants pour l’une ou l’autre catégorie d’école, la réponse de M. Pierre Lombard est nette : « Si c’est pour instaurer une barrière entre les deux écoles (maternelle/élémentaire), la réponse est clairement non. Il faut au contraire, encourager, faciliter, multiplier les passerelles, voire, sous certaines conditions, examiner la possibilité de fusion. Depuis 1989, la scolarité primaire est fractionnée en 3 cycles. Le cycle 2 regroupe la Grande Section de la maternelle, le CP et le CE1 de l’élémentaire. De nombreuses difficultés scolaires que rencontrent les élèves au CP ont aussi pour origine une rupture trop brutale, mal digérée, entre les fonctionnements des deux écoles. Par contre, il est indispensable qu’un module spécial dans la formation de tous les futurs professeurs des écoles, concerne les spécificités de l’enseignement en maternelle. Il en va d’ailleurs de même pour former à la scolarisation des enfants porteurs de handicap ».

Concernant la scolarisation des enfants de moins de trois ans, le 3 juillet 2008, M. Xavier Darcos, alors ministre de l’Education nationale, jetait un pavé dans la mare en déclarant : « Est-ce qu'il est vraiment logique, alors que nous sommes si soucieux de la bonne utilisation des crédits de l'État, que nous fassions passer des concours à bac + 5 à des personnes dont la fonction va être essentiellement de faire faire des siestes à des enfants ou de leur changer les couches ? Je me pose la question, ces personnes ayant la même compétence par exemple que si elles étaient institutrices en CM2 ». L’allusion aux couches était plutôt malvenue puisque tous les parents savent que l’un des critères d’admission à l’école maternelle est la propreté de l’enfant. Depuis lors, Mme Nadine Morano, secrétaire d’Etat chargée de la famille, a lancé des expériences de « jardins d’éveil » pour les 2/3 ans. L’école maternelle serait-elle menacée ? Pour M. Pierre Lombard : « Raisonnablement oui. L’État diminuant de façon significative le nombre d’enseignants, il est en recherche de postes. En maternelle il a un réservoir tentant et accessible. mais pour cela il faudrait d'abord confondre les missions de l'école maternelle et celles des garderies enfantines (…). L’idée d’intégrer des classes relais dans l’école peut se concevoir afin de mieux accompagner la scolarisation des moins matures.

Mais un préalable est indispensable : enlever les ambiguïtés pour que l’expression dans l’école recouvre une réalité institutionnelle, et pas seulement géographique. Les enfants concernés doivent être des élèves (même en devenir) placés sous la responsabilité de celui qui dirige l’école tout comme le personnel affecté à leur encadrement. Or, l’école n’a pas de statut juridique et son directeur n’y est pas reconnu comme tel. Pour ces raisons, envisager la cohabitation entre l’État et les services municipaux, revient à déséquilibrer l'école vers plus de municipalisation. Cela permet le désengagement de l’État et entretient le flou autour des missions de l’école maternelle. C’est pourquoi, loin de s’arc-bouter sur un statu quo illusoire, il nous faut être imaginatifs dans nos propositions, refuser l’isolement et consolider notre appartenance à l’Ecole Primaire ».

Au-delà de cette polémique, anecdotique mais tout de même révélatrice, sachons reconnaître qu’avec l’école maternelle et ses enseignants, notre pays possède un outil efficace pour que tous les jeunes enfants vivant sur notre sol reçoivent les apprentissages fondamentaux.

Mixte dès l’origine

L’école « maternelle » a succédé aux « salles d’asile » créées sous le Second Empire dans des buts sociaux, philanthropiques et… économiques : le développement de l’industrie demandait une main d’œuvre féminine de plus en plus nombreuse et il fallait bien accueillir et « garder » les enfants des ouvrières travaillant aux usines. Relevant du ministère de l’instruction publique, ces établissements prennent officiellement le nom « d’écoles maternelles » sous la IIIème République, en 1881, sous l’impulsion de Pauline Kergomard qui en sera la première inspectrice générale. Dès l’origine, ces écoles sont conçues pour accueillir garçons et filles, inaugurant ainsi une mixité qui ne s’imposera en France que dans les années 1960 dans le reste du système éducatif. Elles sont aujourd’hui qualifiées « d’enseignement préélémentaire ».

Maternelle, la mal nommée ?

Le nom même d’école « maternelle » suppose que ce sont des femmes qui y exercent. Or, de plus en plus d’hommes choisissent cette affectation. Pourquoi un tel choix ? Telle est la question que nous avons posée à M. Pierre Lombard, directeur d’école maternelle.

« Derrière la distinction femme/homme, se cache la notion de métier pour « maman » (à une époque pas si lointaine, on pouvait se présenter au concours sans le Bac, à condition d’être mère d’au moins trois enfants…). Cette question résume bien toutes les ambiguïtés de l’école primaire tout entière, et la difficulté d’en sortir.

De plus l’école maternelle, porte mal son nom. Symboliquement nous sommes dans le rôle du père, celui qui coupe le cordon ombilical, qui tourne le regard de l’enfant vers le monde extérieur. Quand un enfant pleure le matin, ce n’est pas parce qu’il n’aime pas l’école, mais parce il ne supporte pas la séparation d’avec sa mère. L’école maternelle organise cette rupture.

Pas étonnant donc, dans une société qui s’invente des « nouveaux pères », de voir la proportion d’hommes enseignant en maternelle augmenter. En étant plus optimiste, on pourrait y voir aussi (comme dans tous les domaines où l'on revendique le paritarisme) le signe d’une plus grande professionnalisation et le retour d’un contrat clair et fort qui lie l’école à la société. »

NB: Pierre Lombard est vice-président du GDID, association dont tous les directeurs d'école de ce pays devraient faire partie! :-)

1 commentaire:

Pascal a dit…

Un article intéressant en effet, basé sur les propos de quelqu'un qui sait de quoi il parle !
Il faudrait que ce genre de texte diffuse dans plein de directions pour que la voix gouvernementale et médiatique ait un contrepoids !

Pascal, enseignant en GS
http://www.ec-decour-nanterre.ac-versailles.fr/